Il se trouve que le quartier de l'Oasis, dans la belle ville de Casablanca, recèle encore quelques belles pièces. En effet, si nous sommes maintenant en plein tissu urbain, il n'y a pas si longtemps le coin était périphérique voire banlieusard, et il subsiste ici et là quelques ilots de ruralité, et quelques puits en fonctionnement… Il va sans dire que cet habitat rural, a tendance a se transformer en habitat précaire à grande vitesse, voire à bidonvilliser dans les coins à l'abri des regards.
Mais j'aime le parfum qui se dégage des petites demeures coloniales à l'architecture parfois surprenante d'occidentalité. Petits anachronismes mécaniques qui brassent mollement un air nostalgique et désuet.
(et pourtant elle tourne) |
La grande bâtisse en question, je passe devant depuis longtemps et le peu qu'on en voit derrière de hauts murs m'évoque toujours ces lieux ou, accompagnés de quelques jésuites, nous allions, joyeux pensionnaires pré pubères, nous adonner en bande à quelque récollection. Sans doute le volume du bâtiment associé au fait que dans les parages immédiats se trouve l'Église du Carmel St. Joseph, de la même époque, à première vue, ou au moins de la même couleur.
Mais ce jour là, la décrépitude du lieu est d'autant plus frappante que le mur d'enceinte a perdu sa partie haute, récemment démontée. J'en profite pour jeter un œil.
Et là, je découvre émerveillé un jardin luxuriant bien que négligé, mêlant des influences andalouses et anglaises, un petit écrin botanique en terrasses cloisonnées, surveillé par une grenouille vernissée. Clic clac.
Mais surgit tout à trac un type, gardien du paradis, et clairement pas disposé à me faire visiter les lieux. Je me replie en adoptant un air dégagé de circonstance.
Ce matin, j'ai appris l'histoire de cette maison.
C'était la dernière demeure d'Auguste Cadet, un des plus grands architecte de Casablanca, bâtisseur entre autre, et avec d'autres du fameux quartier des Habbous (spécialement la Mahakma) que les touristes prennent souvent pour un quartier traditionnel, tellement il est emblématique du style "marocain". Il faut dire qu'Auguste Cadet était très imprégné, influencé et respectueux du style local. Sa maison était d'ailleurs un hommage à l'architecture hispano-mauresque, une sorte de manifeste, de compilation de ces styles. À sa mort, il l'a légué à l'Académie d'Architecture… Française. Qui l'a revendue à je ne sais qui.
Avant hier, une nouvelle ouverture dans le mur est apparue…
…et tout à l'heure, nous nous sommes retrouvés, à l'appel de l'association Casa Mémoire, une petite trentaine, à contempler le paradis devenu enfer.
Certains voulaient chercher "la grenouille", mais il nous était interdit d'entrer.
Apparemment, j'ai pris la dernière photo de "la grenouille" à son poste.
Ce qu'il reste dudit poste de surveillance se situe, sur la photo ci contre, à peu prés entre le b et le l de mon filigrane, un peu au dessus.
J'en ai profité pour photographier l'éolienne, on la voit vachement mieux maintenant. Faudrait pas perdre la trace de cette époque… de cette culture.
3 commentaires:
Magnifique exemple d'une exploitation intelligente du vent : pomper de l'eau. Quand y'a du vent, ça pompe. Quand y'en a pas, tant pis, ça sera pour demain. Ceci étant, le paysage ne se plaindra pas lorsque cette éolienne sera démontée...
Hélas, on a aussi à faire à une magnifique exploitation débile de l'argent… Le démontage de l'éolienne ne m'aurait pas vraiment chagriné…
Il y a fort à parier qu'à l'emplacement actuel du jardin de la grenouille un gougnafier inculte, mais plein aux as va nous édifier une salouprie immobilière dont la principale qualité sera la rentabilité… Le reste de la rue a été défiguré de la même manière…
Il est vraiment bien ton papier, merci, on apprends quelque chose, malheureusement les bulldozers doivent en commettre de belles un peu partout ailleurs au Maroc.
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